RECIT – Le magazine Cité Black racontée par sa fondatrice, Hortense Assaga

RENCONTRE –  L’Afro a eu la chance d’interviewer Hortense Assaga, fondatrice de feu Cité Black. Aujourd’hui sur Africa 24, la journaliste souriante et dynamique, revient sur cette aventure éditoriale, pionnière sur le web.

hassaga

C’était bien avant L’Afro mais les problématiques sont les mêmes. Hortense Assaga, journaliste télé sur  Africa 24, crée en 2000 le magazine Cité Black qui n’existe plus aujourd’hui. Toujours avec le sourire et une pointe de nostalgie, cette éternelle optimiste a accepté de revenir sur ses années en tant que fondatrice et rédactrice en chef du magazine historique disponible à la BNF.


 » Il coûtait 2 euros puis 2,30 euros, le mensuel Cité Black. Quand je me suis lancée, toute seule, en 2000, les gens me prenaient pour une folle. Il a fallu prouver que le projet était viable, nécessaire. Puis, mon entourage m’a suivi. A l’apogée du magazine, nous étions cinq. J’étais à la fois rédac chef, DAF, journaliste et rédactrice d’un peu toutes les rubriques, ce qui est très formateur. Quand je repense à ce travail, je me dis : « Quelle jeunesse ! Quelle énergie » !

Le nom Cité Black signifie Les Noirs dans la cité. La cité, non pas dans le sens péjoratif qu’il peut avoir aujourd’hui, mais dans le sens de société, ce sont les Noirs citoyens. Et puis, c’était international, puisque le magazine se vendait au Canada et aux Etats-Unis. J’ai eu l’honneur de présenter mon magazine à Aimé Césaire qui m’a dit quelque chose qui résume assez bien l’esprit du magazine : « Les Blacks d’aujourd’hui sont les nègres d’hier ».

Le magazine s’est lancé en 1999, d’abord sur le web, alors balbutiant, que j’avais découvert chez des ami.e.s à San Francisco. C’était le moyen le plus viable économiquement, à l’époque. Le mensuel s’adressait aux hommes et aux femmes de la diaspora. Il était le produit de ce que je suis, c’est-à-dire une parisienne et une africaine qui voulait se reconnaître dans ce qu’elle lisait.

Avant sa création, je n’avais pas trouvé de média dans lequel je puisse m’identifier sur des problématiques esthétiques et encore moins capillaires ! Je me souviens qu’adolescente, à Londres, j’ai vu des journalistes noir.e.s présenter le journal TV ; je me suis dit que je serai journaliste et monterai mon média en France où on y verrait des Noir.e.s.

Le plus difficile a été de financer le magazine. Pour faire un numéro, -il y en a eu 77-, ça coûtait 13 000€ ! On a donc fait appel à des annonceurs mais j’ai une éthique : le mot d’ordre c’était hors de question d’accepter des pubs de crèmes éclaircissantes et de produits défrisants ! Alors j’ai fait appel aux grandes marques mais à une condition : qu’elles fassent des pubs spécialement pour le mag avec des modèles noirs. Garnier, L’Oréal et d’autres l’ont fait. L’argent, le nerf de la guerre, est la raison pour laquelle j’ai du tout arrêter en 2008.

Quand je me replonge dans les pages du magazine, j’ai plein de souvenirs qui me reviennent. On a interviewé pas mal de personnalités noires avant qu’elles explosent : Omar Sy, Patson, Fabrice Eboué, Harry Roselmack …  Je me dis que finalement les choses ont très peu changé depuis ; on voit toujours les mêmes personnes et on a tendance à oublier ce qui a été fait avant et à toujours repartir de zéro.

On a aussi eu Josiane Balasko et Jérôme Savary, qui nous aimait beaucoup. On n’était pas sectaire et on parlait de toutes sortes de sujets comme la Marche des fiertés en 2006. Tout le monde pouvait s’y retrouver dans le magazine. D’ailleurs, parmi les abonné.e.s, on avait beaucoup de Blanch.e.s.

Remettre sur pied un tel projet aujourd’hui, c’est possible mais le problème sera toujours le même : l’argent. A celles et ceux qui veulent se lancer, je dis : soyez prescripteur.ice.s ! Et bien entouré.e.s.

Si c’était à refaire, je le referai. C’était une goutte d’eau mais avec elles, on fait des rivières. Une petite pierre à l’édifice que l’on peut consulter à la BNF. »

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