ENTRETIEN – Au MaMa, on a pu voir la nouvelle coqueluche de la chanson française Eddy de Pretto, le vibrionnant Killason ou encore le sublime Jordan Mackampa. Les femmes ont particulièrement brillé lors de cette édition. Kristel Ratri Band, l’un des quelques groupes africains programmés sur cette édition, en activité depuis 2013, était aussi à l’affiche. Rencontre à cette occasion.
On a parlé avec Kristel Ratri, leader du groupe du même nom, en concert ce mercredi soir à la Bellevilloise à Paris.
« Depuis toute petite je baigne dans la musique. À 8 ans, je découvre Jaco Pastorius », et c’est la révélation, confie à L’Afro, la leader du groupe malgache Kristel Ratri Band. Son père est jazzman et bluesman, l’environnement est favorable pour embrasser une carrière musicale. Mais c’est elle qui choisit, la basse, une autre évidence. « Ce n’est pas facile d’imposer le fait d’être une femme et de jouer de cet instrument, mais on peut tout faire !!! », insiste l’artiste et jeune maman -elle couve un enfant de deux ans-.
Musicalement, à quoi s’attendre si on va la voir pour la première fois ce mercredi soir à La Bellevilloise à Paris – où c’était leur première fois professionnelle en dehors de Madagascar- ? À une musique pop-rock teintée d’électro.
« Dans nos textes, on parle beaucoup de notre vie quotidienne, à Madagascar, comme dans ‘Courir’ où on évoque les embouteillages, les routes accidentées de chez nous ; c’est universel en réalité. » Kristel est bassiste et leader de son propre groupe, où on trouve également son époux, dans un pays où le rock n’est pas tellement « tendance », comme elle l’avoue elle-même. » On est passionné, et on a rencontré les bons partenaires, sans qui le projet n’aurait pas pu avancer. »
Madagascar, l’île, qui de notre point de vue ethnocentré peut être vue comme lointaine, isolée, « exotique », est méconnue. L’une de ses nouvelles ambassadrices, femme, noire et fièrement talentueuse, s’appelle Kristel Ratri.
Kristel Ratri Band sera au Bar en Trans à Rennes le 9 décembre 2017.
Vous pouvez acheter son EP TNM sur toutes les plateformes, ou suivre son actu et la féliciter d’être là en allant sur sa page Facebook Kristel Ratri Band.
Le festival parisien a débuté aujourd’hui et permet aux professionnel.le.s du monde de la musique de se rencontrer. C’est l’occasion de (re)découvrir des artistes qu’on aime. Voici une -très- petite sélection.
Khadyak Bon, on avoue : on n’a toujours pas trop compris ce qu’était la ghetto pop. Malgré ça, on a décidé de ne pas se fier au nombre de vues de Khadyak sur Youtube mais plutôt l’univers que la danseuse, mannequin, rappeuse déploie, une électro très 80s, inspirée par la musique de ballroom, chantée parfois en anglais, parfois en français. Mieux vaut se faire une idée de Khadyak sur scène, lieu où la slasheuse assure autant que son rutilant pseudo. Mercredi 18 octobre à 21h30 au Carmen
Killason C’est l’occasion d’aller voir ce rappeur, à part sur la scène francophone. Et ce, pour une bonne raison : le performer -il danse depuis plus d’une décennie- ne chante pas en anglais. Celui qu’on avait découragé de poursuivre à poser dans la langue de Shakespeare a poursuivi sa route et délivrera un set de pure energy music. On ne sait pas s’il sera entouré de son crew de danseur.se.s, mais ça promet d’être épique. On postera l’interview qu’il nous a accordé la semaine prochaine, pour achever de vous convaincre qu’il est un des artistes sur lequel il faut absolument garder un oeil. Jeudi 19 octobre à 22h30 au Backstage by Mill, Paris 18e
Kristel Elle vient de Madagascar et comme ses collègues de Dizzy Brains, elle fait une musique rock inhabituelle pour le pays,comme elle nous l’a confié.On a hâte de voir la bassiste avec son groupe, dont elle est la leader. En plus, c’est leur première fois en France. Pareil, on risque de vous en reparler la semaine prochaine. A suivre ! Vendredi 20 octobre à 21h15 au Bus Palladium, Paris 9e
TROMBINOSCOPE – Parce qu’on n’en peut plus d’entendre que les comédien.ne.s noir.e.s en France sont invisibles, qu’on n’en connaît peu, que si, que là… on a décidé d’en présenter un, brièvement, tous les jours. Aujourd’hui : Jackee Toto.
Invisibles, les comédien.ne.s afrofrançais.e.s ? Pendant que nous nous demandons si nous sommes capables d’en citer plus de cinq, les artistes s’affairent dans les écoles de formation, les bureaux de casting, sur les plateaux de cinéma, les planches.
Loin de nier la ligne de couleur qui règne au théâtre, au cinéma, à la télévision et malgré des améliorations, nous voulons les mettre en valeur, comme d’autres avant nous, justement parce qu’il peut être difficile de savoir où /quand on peut les voir.
Vous trouverez ici chaque semaine le nom et la photo d’un.e comédien.ne noir.e, sa date de naissance, les productions marquantes dans lesquelles ille a joué, son dernier rôle. Aujourd’hui : Jackee Toto.
On a vu principalement Jackee Toto à la télévision et au cinéma, mais il a également interprété quelques rôles au théâtre notamment en 2012 dans la pièce Andromaque m’a tuée, montée par Naïs El Fassi ou plus récemment, en 2015, dans une mise en scène par Yohann Manca des Radeaux de Christian Siméon.
Sur le petit écran, il a joué dans la série R.I.S – Police scientifique en 2012. L’année précédente, il s’était retrouvé dans le programme court La Vie secrète des jeunes de Riad Sattouf, comme William Lebghil – Soda, Les Beaux gosses…- ou encore Hedy Bouchenafa -vu notamment dans En passant pécho-.
En 2015, Jackee Toto est Pierre dans Patries de Cheyenne Carron. En 2016, il retrouve William Lebghil dans La Fine Equipe, qu’ils forment avecAnnabelle Lengronne, Doudou Masta ou encore Raph Amoussou, réalisé par Magaly Richard-Serrano.
En 2017, Jackee est à l’affiche du nouveau Toledano et Nakache, les réalisateurs d’Intouchables, aux côtés de Jean-Pierre Bacri et Eye Haïdara entre autres. Ce film est sorti le même jour qu’Happy End de Michael Haneke, au casting duquel on trouve l’acteur, donc, mais aussi Isabelle Huppert, Jean-Louis Trintignant ou encore Matthieu Kassovitz.
Vous n’avez pas fini de le voir car Jackee sera dans le prochain film de Pierre Salvadori, Remise de peine. Il jouera aux côtés de valeurs sûres du cinéma français telles Audrey Tautou – Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain, Da Vinci Code…, Adèle Haenel -Naissance des pieuvres, 120 Battements par minute…, ou encore Pio Marmaï, Le Premier jour du reste de ta vie… .
« L’ « exposition médiatique » combinée au fait d’être une femme noire « insoumise » débouche sur des attaques et des campagnes de dénigrement, harcèlement politico-médiatiques«
Politique – Dans son parti composé d’individualités, générant des dissonances en public allant du comique -le rapport aux médias- au tragique – Adama Traoré-, Danièle Obono fait entendre sa voix. Enfin quand elle le peut. Quand on ne commente pas la manière de se coiffer, son afrodescendance. Honorées qu’elle ait accepté notre proposition -comme pour les autres- de figurer parmi les #Fraicheswomen, nous clôturons avec elle cette série. Son travail au sein de la France Insoumise, le « double standard », les revers de l’exposition médiatique… Danièle Obono nous a parlé de sa vie de députée.
Comment définissez-vous votre travail ?
Ce n’est pas vraiment un « travail », même si on travaille beaucoup. C’est une responsabilité, une fonction, une forme particulière de mon engagement politique auquel je consacre aujourd’hui la majorité de mon temps, au lieu seulement d’une partie, et pour laquelle je suis indemnisée…C’est très stimulant car on apprend énormément de choses sur un grand nombre de sujets, on a l’opportunité de rencontrer plein de gens très intéressants, et on peut faire entendre nos idée sur une large échelle. En même temps, comme dirait l’autre, on peut aussi très vite être submergé par le flot des informations, des sollicitations, le rythme de travail imposé, notre petit nombre et le peu de moyens dont nous disposons en tant que petit groupe parlementaire signifie que nous n’avons pas toujours le temps d’aller au fond de chaque thème, ce qui est parfois très frustrant. Et quand on combine l’ « exposition médiatique » au fait d’être une femme noire « insoumise » cela donne des attaques et des campagnes de dénigrement, harcèlement politico-médiatiques qui rajoute à une certaine lassitude. Heureusement qu’on est un groupe solide, soutenu par un mouvement dont les membres sont très actifs et réactifs. Les soutiens viennent aussi de bien au-delà de la France Insoumise: des citoyens et des citoyennes dans la circonscription, des militant·e·s du mouvement social, des syndicalistes, associatifs, etc. C’est cela qui me donne la force et l’inspiration de continuer.
A-t-on essayé de vous décourager ou au contraire vous avez été choyée, portée dans votre entreprise ? Non, mon entourage n’a pas essayé de me décourager. Ma famille a toujours eu une attitude un peu perplexe mais bienveillante face à mon engagement. Tout au plus m’a t-on enjoint à faire attention, dans les manifs, les actions, etc., vu que je n’ai eu la nationalité française qu’assez récemment. Donc, pendant longtemps, je devais faire renouveler ma carte de séjour. Et puis elle m’a aussi rappelé qu’étant femme et noire, je devais être doublement irréprochable car je serai toujours traitée différemment et soumise à une double pression.
Quand vous êtes-vous vraiment sentie femme politique ?
Je me considère d’abord comme une militante politique qui a aujourd’hui des responsabilités et une visibilité un peu particulières. C’est à la réaction des gens dans la rue ou dans le métro que je me suis rendue compte de la nouvelle manière dont j’étais perçue. Plus simplement comme une femme noire parmi d’autre mais comme Madame la députée, « honorable », qu’on a vu à la télé avec Mélenchon. Le plus drôle c’est souvent la réaction des enfants, le plus touchant les parents.
Danièle Obono crédits Noella L
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Plein de choses ! En premier lieu la question des « contrats aidés » : au-delà delà du soutien que nous apportons aux nombreuses associations qui nous ont interpellées sur le sujet, nous allons organiser un atelier législatif pour élaborer une proposition de loi sur le sujet en partant de la proposition de notre programme sur le droit à l’emploi opposable et de l’expérimentation des « territoires zéro chômeurs » votée sous la précédente mandature. Nous sommes également en train de prendre contact avec différentes associations et collectifs de défense des droits humains pour travailler en commun sur un proposition de loi interdisant l’usage par les forces de police et de sécurité des techniques d’immobilisation létales. Autre gros dossier, celui des prisons sur lesquelles nous préparons un gros dossier et des interpellations.
En parallèle nous suivons et participons aussi à toutes les mobilisations nationales (contre la loi travail), les luttes locales (défense des services publics, logement, éducation); ainsi que des dossiers plus spécifiques comme la lutte des Chibanis de la SNCF (sur laquelle j’ai récemment interpellé la ministre des Transports).
Quelle est votre principale source d’inspiration ?
J’en ai beaucoup et de plusieurs ordres ! Mais si je dois en désigner « une » principale, je dirais : les gens qui luttent, qui se battent, envers et contre tout, pour l’égalité et la dignité, pour leurs droits, tout simplement. C’est ça qui m’aide à retrouver la boussole, me rappelle pourquoi je fais ce que je fais et me (re)donne l’énergie nécessaire pour continuer.
« Pour les blancs, je ne suis pas blanche et pour les noirs, je ne suis pas noire… pas pour tous bien évidemment, mais dans le milieu militant notamment, c’est assez complexe. «
ASSOCIATIF – Manon Ahanda est l’une des co-fondatrices du BAAM, le bureau d’accueil et d’accompagnement des migrant.e.s. Un bienfait, Que ce soit en suivant ses différents posts sur ses divers réseaux sociaux, ou sa présence au shooting, l’envie de « faire et d’être avec » de Manon a rendue encore plus légitime cette séance avec les #Fraicheswomen.
Comment définissez-vous votre travail ?
C’est difficile de qualifier ce que je fais comme un boulot, on pense souvent au boulot comme à un truc pas forcément très cool -bon, j’ai de la chance, j’aime le mien-.
Au sein du BAAM, notre association, -le bureau d’accueil et d’accompagnement des migrant.e.s-, je dirais que chaque bénévole, chaque membre de l’asso, fait le boulot que l’Etat devrait faire.
Bon, on n’a pas les mêmes moyens…
Du coup on bricole comme on peut avec les moyens que l’on a.
Heureusement, ça fonctionne !
Les gens ont tendance à oublier que tous les bénévoles justement sont bénévoles, nous ne sommes pas payés, -personne !- et c’est ce qui rend les choses encore plus belles 🙂
Comme dans ma vie professionnelle, j’ai testé pas mal de choses au sein de l’asso, j’ai fait beaucoup de terrain -aller dans les camps-, j’ai fait du social -suivi de dossiers administratif-, du médical. Aujourd’hui je m’occupe essentiellement des événements « festifs » du BAAM : trouver des lieux, des artistes, des intervenants politiques et intellectuels, et faire en sorte de créer une vraie mixité.
Un endroit où les migrant.e.s et les « français » se mélangent, échangent pour aider à faire tomber ces putains de préjugés !
J’adore ça !!
A-t-on essayé de vous décourager ou au contraire vous avez été encouragée, choyée, portée dans votre entreprise ?
Pour moi c’est assez différent, étant métisse.
Pour les blancs, je ne suis pas blanche et pour les noirs, je ne suis pas noire… pas pour tous bien évidemment, mais dans le milieu militant notamment c’est assez complexe.
De quoi devenir folle.
Mais je dirais que mes proches m’ont toujours soutenue, d’être fière -toujours- et de ne pas oublier d’où je viens.
À quel moment avez-vous décidé de vous impliquer dans la vie associative pour aider les migrant.e.s ?
J’étais cheffe cuisinière puis j’ai décidé de me mettre à mon compte.
J’habitais dans le 18ème, c’était le 8 juin 2015 ; cela faisait une semaine que j’étais au chômage et que j’en profitais 🙂
Ma coloc m’envoie un message en me disant : « Si tu veux faire des photos, prends l’appareil et viens maintenant, si tu veux être utile. » Je m’y suis rendue sans savoir du tout ce qu’il se passait.
Ou, du moins, je ne m’attendais pas à ce qui s’est passé.
Je suis arrivée et j’ai vu une centaine d’hommes et de femmes encerclé.e.s par des centaines de flics… avec des cars le long de la route, à la Halle Pajol.
Les migrant.e.s étaient « protégé.e.s » par des élus.
C’était d’une violence… Je ne sais plus comment je me suis retrouvée avec les réfugié.e.s, les flics fonçaient dans le tas et attrapaient les migrant.e.s comme ils le pouvaient, par les pieds, les bras, la tête, les cheveux.
On hurlait comme on pouvait « Freedom » « solidarité avec les réfugiés » ou encore « des papiers pour tous » les migrant.e.s disaient « des papiers pour tous » -on en rigole ensemble aujourd’hui-
Vraiment, je n’ai pas les mots pour décrire la violence…
Une fois que tu mets un pied dedans, impossible de refermer les yeux.
Le soir, il y avait plusieurs mineurs qui dormaient à la maison, et on n’a pas arrêté d’héberger des personnes pendant plusieurs mois.
J’ai tellement d’anecdotes depuis le début de mes activités militantes (soupirs).
C’est plus une histoire… qui me touche beaucoup.
Quelques mois après j’ai pu rencontrer une famille. Lui est soudanais musulman, elle éthiopienne orthodoxe et le petit est né en Libye.
Ils sont venus un moment habiter à la maison.
Une journaliste a voulu suivre leur histoire, nous sommes devenues amies elle et moi et aujourd’hui on les appelle la famille. Ils m’ont demandé de trouver le prénom de leur deuxième enfant, j’ai choisi « Aimé » je vous laisse deviner pourquoi… : )
Je pense d’ailleurs qu’on est un peu l’exception qui confirme la règle à l’expression « on ne choisit pas sa famille ».
Et puis sur nos prochains événements, ça prend du temps, et de l’énergie 🙂
J’espère même pouvoir faire un événement un de ces jours avec toutes ces super nanas que j’ai pu rencontrer grâce à vous, ça serait génial -une vraie réponse de #Fraîcheswomen, ça ;), ndlr- .
Quelle est votre principale source d’inspiration ?
Les femmes, les femmes qui font ou ont fait partie de ma vie.
Des nanas qui ne baissent pas les bras et qui sont toujours là pour me donner la niaque quand j’ai un coup de mou.
Qui elles mêmes se battent tous les jours et toutes dans des milieux où c’est pas simple d’être une nana.
Et mon mec bien sûr qui me soutient quotidiennement et me pousse lui aussi à aller plus loin.