#FraichesWomen2019 – Anne Sanogo : « La culture manque toujours de personnes racisées aux postes décisionnaires »

PORTRAIT – Anne s’est imposée à nous parce qu’à notre sens, elle est, à 34 ans, une actrice importante du milieu culturel français. Très curieuse, elle est l’affût de tout ce qui se passe en termes d’art contemporain, de danse, d’installations d’artistes… C’est à son flair et à son talent pour créer l’événement que l’on doit la venue de la grande Oumou Sangaré, la tenue du battle Break The Beat ou encore de voir mixer Bamao Yendé ou Miss Mak à la Villette, entre autres. Quand on a fait la séance photo, Anne portait encore des extensions, des « mèches ». Quand on a repris contact pour publier cette série, Anne avait fait un big chop. Un moment qui a pris des allures de véritable rite de passage – les cheveux d’avant ont été enterrés- , vers une nouvelle manière d’envisager sa vie, le regard qu’elle porte sur elle -le seul qui compte désormais-Bonne lecture !

Les 8 #fraicheswomen de l’édition 2019 ont chacune donné leur avis sur la thématique de cette seconde édition du projet photo, à savoir la « black excellence », -preuve que les Noir.es ne devraient pas être essentialisé.es -et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles nous avons créé L’Afro le 31 octobre 2015 ;).

– L’idée de bosser dans le milieu culturel : Comment ça s’est fait ? Quand as-tu eu le goût et le déclic ?

J’ai eu la chance d’habiter dans des villes où les politiques culturelles étaient présentes et à un moment où l’idée de rendre la culture accessible au plus grand nombre était prédominante.
Il y avait une vie culturelle : des associations , des équipements, des maisons de quartier où l’on pouvait faire pléthore d’activités.

J’ai aussi été  sensibilisée très jeune à l’art  à la culture en participant à des projets d’éducation artistique et culturelle durant ma scolarité et plus tard par le biais d’associations culturelles dont je faisais partie.
On organisait de évènements dans le but de fédérer, de rassembler.
En 2007, je finissais à l’époque un Master LLCE anglais  (où j’ai effectué mon mémoire sur les musiciens Gil scott Heron ,  les Last Poets  à travers le prisme du mouvement des droits civiques) , je me posais beaucoup de  questions,  puis  j’ai enchaîné sur un autre Master en Politique et gestion de la Culture.
Et là j’ai eu l’impression d’être dans mon élément,  je pense que  le fait d’avoir pu développer ma curiosité à l’art  m’a donné envie de m’y impliquer à mon tour.
Il y a toujours eu cette fibre artistique en moi, mais dans mon esprit ,j’envisageais cela comme  une activité  en dehors de toute professionnalisation.
J’ai fait des stages dans des domaines différents   ( rédaction  de magazines jazz, en presse sur un festival de cinéma…)  et suis passée par plusieurs postes (communication et développement des publics  pour des scène de musiques actuelles, chargée de production pour des festivals… ).
Et en 2011, je suis arrivée au sein de cette institution publique, d’abord en tant qu’assistante du directeur de la programmation puis en tant que chargée de programmation, poste que j’occupe actuellement.

– Est-ce que ton choix de carrière a étonné/ effrayé/ rassuré tes proches ?

Mon entourage familial ne comprenait pas toujours mes choix  à l’époque car  ils souhaitaient avant tout que je trouve un emploi  qui m’assure une stabilité, un métier  plus « conventionnel » selon leurs critères ( médecin, avocat, professeur…) mais les respectaient. Peut-être étaient-ils aussi un peu sceptiques face à un domaine  qu’ils connaissaient peu ? Au final ils m’ont toujours poussée et soutenue durant mes études car  pour eux la notion d’indépendance était très importante.
Il fallait que je puisse faire des études afin de pouvoir  choisir réellement mon  métier.

Y a-t-il eu -existent-ils toujours ?- des freins pour te permettre de travailler et de progresser tranquillement dans cet univers ? Je ne pense pas vraiment en termes de frein mais plutôt en termes de  course d’obstacles que l’on doit surmonter. Il est clair que la course  parait plus longue en tant que personne ne venant pas d’un milieu social où  la culture est présente car n’ayant pas au départ « le réseau », « les codes ».
Elle l’est d’autant plus au sein d’univers  professionnels  qui manquent toujours de représentation de femmes racisées à des postes décisionnaires.
C’est une gymnastique au  quotidien de garder confiance en soi et en ses capacités donc j’essaie de me fixer des objectifs et de les garder en ligne de mire avec de l’entraînement, de la détermination.
Et à travers mon métier au quotidien, d’intégrer au mieux la dimension inclusive lorsque j’élabore une programmation.

Que t’évoque l’expression « black excellence » ? 
Je ne connaissais pas cette expression mais ça m’évoque des figures  qui m’inspirent au quotidien et me donnent  la force  de poursuivre mes envies, d’être moi-même. Je pense à des personnalités inspirantes comme Serena Williams , Christiane Taubira, Nina Simone, Oumou  Sangaré… ma mère. Il y en a en vérité tant d’autres à citer !

Trouves-tu le temps de faire d’autres choses à côté ? J’essaie de trouver le temps, oui. C’est pas toujours évident mais c’est essentiel pour moi, cela me permet  d’élargir mon horizon  et faire appel à d’autres ressources créatives.
Je chante, je compose et j’écris. Je travaille aussi sur un projet chorégraphique.
Je suis persuadée que l’on peut porter plusieurs casquettes, le plus important est de faire les choses à fond.

– Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à quiconque, et en particulier aux femmes, qui souhaiteraient se lancer dans ton domaine ?
De  cultiver la passion et la curiosité au quotidien, c’est ce qui permet de se renouveler, se régénérer. Garder de la détermination et se faire confiance !  



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