ETUDE – Pour ses dix ans, le Conseil Représentatif des Associations Noires (CRAN) a lancé un site de statistiques populaires lundi dernier. Une initiative qui pose question.
Louis-Georges Tin, actuel président du CRAN, déclare sur la page Facebook de l’organisation : « Nous invitons le public à nourrir ce site interactif, ce qui nous permettra d’interpeller les structures concernées ». Pour les 10 ans de la fédération, le CRAN a réalisé une vieille envie.
Depuis plusieurs années, le CRAN critique le manque d’études pouvant rendre compte des discriminations dont sont victimes les minorités dans des domaines divers comme le logement, le monde du travail et l’éducation .
Aujourd’hui, avec http://www.statistiquespopulaires.fr, le CRAN espère que tout un chacun participera à pallier à cette carence en proposant « des statistiques ethniques, faites non pas par des instituts officiels, mais faites par nous tous » pour « mesurer la représentation des minorités ethniques » dans un milieu donné. Cette initiative participative, aussi encourageante soit-elle, comporte cependant quelques limites.
*La fiabilité de la méthode
La première question que l’on se pose : la véracité des données récoltées par les citoyens. Lorsque l’on va jeter un œil dans la section « à vous de jouer » sur le site, tout ce que l’on demande à la personne menant l’enquête est son identité, le milieu étudié, ce qu’elle a observé et les chiffres qu’elle a trouvé.
Aucun conseil sur la façon dont une étude de ce type doit être menée ni sur l’échantillonage pouvant indiquer de la manière la plus précise possible une éventuelle discrimination. Aucune indication concernant une potentielle vérification également.
Ce qui nous mène à une seconde interrogation : pourquoi ne pas tout simplement solliciter des professionnels de la recherche non-blancs qui pourraient mener ces études ? Ce serait logique vu que CRAN reproche à Yves Calvi la quasi totale absence d’experts issus de la diversité, reprenant les informations publiées sur le site Enquête & Médias en janvier 2010.
*Et qu’est-ce qu’on fait maintenant ?
Oui, les discriminations existent. Il est essentiel de faire un constat, chiffres à l’appui, de l’ampleur des disparités au sein des minorités, tous domaines confondus. Même si la France interdit officiellement les statistiques ethniques, il en existe bien. Pour rappel, une étude a été menée par le CNRS en 2009 prouvant que les noirs étaient six fois plus susceptible de subir un contrôle au faciès que n’importe quel autre groupe.
Le CRAN a donc décidé d’épingler quelques mauvais élèves niveau représentativité parmi lesquels des médias (notamment France TV avec à peine 3% de diversité au sein de la direction de France télévision) ou encore le monde de l’entreprise (avec la moitié des entreprises du CAC 40 ne comptant aucune minorité au sein de leur conseil administratif). Mais une fois ces faits dévoilés, quelles solutions proposées pour y remédier ?
L’Afro a tenté de joindre des responsables de l’association pour aborder ces questions mais n’a pas eu de retour de leur part pour le moment.