#Fraicheswomen2017 n°9 : Danièle Obono, députée à l’Assemblée Nationale

Danièle Obono crédits Noella L

«  L’ « exposition médiatique » combinée au fait d’être une femme noire « insoumise » débouche sur des attaques et des campagnes de dénigrement, harcèlement politico-médiatiques« 

Politique – Dans son parti composé d’individualités, générant des dissonances en public allant du comique -le rapport aux médias- au tragique – Adama Traoré-, Danièle Obono fait entendre sa voix. Enfin quand elle le peut. Quand on ne commente pas la manière de se coiffer, son afrodescendance. Honorées qu’elle ait accepté notre proposition -comme pour les autres- de figurer parmi les #Fraicheswomen, nous clôturons avec elle cette série. Son travail au sein de la France Insoumise, le « double standard », les revers de l’exposition médiatique… Danièle Obono nous a parlé de sa vie de députée.

Comment définissez-vous votre travail ? 

Ce n’est pas vraiment un « travail », même si on travaille beaucoup. C’est une responsabilité, une fonction, une forme particulière de mon engagement politique auquel je consacre aujourd’hui la majorité de mon temps, au lieu seulement d’une partie, et pour laquelle je suis indemnisée…C’est très stimulant car on apprend énormément de choses sur un grand nombre de sujets, on a l’opportunité de rencontrer plein de gens très intéressants, et on peut faire entendre nos idée sur une large échelle. En même temps, comme dirait l’autre, on peut aussi très vite être submergé par le flot des informations, des sollicitations, le rythme de travail imposé, notre petit nombre et le peu de moyens dont nous disposons en tant que petit groupe parlementaire signifie que nous n’avons pas toujours le temps d’aller au fond de chaque thème, ce qui est parfois très frustrant. Et quand on combine l’ « exposition médiatique » au fait d’être une femme noire « insoumise » cela donne des attaques et des campagnes de dénigrement, harcèlement politico-médiatiques qui rajoute à une certaine lassitude. Heureusement qu’on est un groupe solide, soutenu par un mouvement dont les membres sont très actifs et réactifs. Les soutiens viennent aussi de bien au-delà de la France Insoumise: des citoyens et des citoyennes dans la circonscription, des militant·e·s du mouvement social, des syndicalistes, associatifs, etc. C’est cela qui me donne la force et l’inspiration de continuer.

A-t-on essayé de vous décourager ou au contraire vous avez été choyée, portée dans votre entreprise ?
Non, mon entourage n’a pas essayé de me décourager. Ma famille a toujours eu une attitude un peu perplexe mais bienveillante face à mon engagement. Tout au plus m’a t-on enjoint à faire attention, dans les manifs, les actions, etc., vu que je n’ai eu la nationalité française qu’assez récemment. Donc, pendant longtemps, je devais faire renouveler ma carte de séjour. Et puis elle m’a aussi rappelé qu’étant femme et noire, je devais être doublement irréprochable car je serai toujours traitée différemment et soumise à une double pression.

Retrouvez l’édito photo et toutes les #fraicheswomen réunies  

Quand vous êtes-vous vraiment sentie femme politique ?

Je me considère d’abord comme une militante politique qui a aujourd’hui des responsabilités et une visibilité un peu particulières. C’est à la réaction des gens dans la rue ou dans le métro que je me suis rendue compte de la nouvelle manière dont j’étais perçue. Plus simplement comme une femme noire parmi d’autre mais comme Madame la députée, « honorable », qu’on a vu à la télé avec Mélenchon. Le plus drôle c’est souvent la réaction des enfants, le plus touchant les parents.
Danièle Obono crédits Noella L

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

Plein de choses ! En premier lieu la question des « contrats aidés » : au-delà delà du soutien que nous apportons aux nombreuses associations qui nous ont interpellées sur le sujet, nous allons organiser un atelier législatif pour élaborer une proposition de loi sur le sujet en partant de la proposition de notre programme sur le droit à l’emploi opposable et de l’expérimentation des « territoires zéro chômeurs » votée sous la précédente mandature.
Nous sommes également en train de prendre contact avec différentes associations et collectifs de défense des droits humains pour travailler en commun sur un proposition de loi interdisant l’usage par les forces de police et de sécurité des techniques d’immobilisation létales. Autre gros dossier, celui des prisons sur lesquelles nous préparons un gros dossier et des interpellations.
En parallèle nous suivons et participons aussi à toutes les mobilisations nationales (contre la loi travail), les luttes locales (défense des services publics, logement, éducation); ainsi que des dossiers plus spécifiques comme la lutte des Chibanis de la SNCF (sur laquelle j’ai récemment interpellé la ministre des Transports).

Quelle est votre principale source d’inspiration ? 

J’en ai beaucoup et de plusieurs ordres ! Mais si je dois en désigner « une » principale, je dirais : les gens qui luttent, qui se battent, envers et contre tout, pour l’égalité et la dignité, pour leurs droits, tout simplement. C’est ça qui m’aide à retrouver la boussole, me rappelle pourquoi je fais ce que je fais et me (re)donne l’énergie nécessaire pour continuer.

(Crédits photo : Noellal)

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